La socialisation, un défi pour les zèbres ?
Ne pas se sentir compris, avoir des préoccupations singulières, être passionné par des sujets insolites, ne pas savoir partager de manière fluide, le sentiment de décalage est répandu chez les zèbres. Lorsqu’il est présent, il peut même être vécu comme une réelle souffrance, car ce sentiment est le signal de la présence d’au moins un besoin non assouvi. Alors, que peut-on dire sur douance et socialisation ? Cette analogie est-elle pertinente ?
Qu’est-ce qui peut faire obstacle à la socialisation des surdoués ?
La notion de socialisation désigne le fait de s’adapter aux besoins d’un groupe. Dans son versant le plus négatif, cette notion peut entraîner une aliénation des individus. Pourtant, la socialisation n’est-elle pas un des besoins fondamentaux des êtres humains ? Ne sommes-nous pas tous constitués pour appartenir à un groupe ? Alors, comment ce besoin s’applique-t-il lorsque l’on est HPI et que l’on possède un fonctionnement « hors norme » ?
- Les interactions sociales, un besoin humain fondamental
- La difficulté de socialisation chez les profils complexes
- Les besoins propres aux HPI
- La solitude choisie du zèbre
Les interactions sociales, un besoin humain fondamental
La notion d’appartenance sociale apparaît dans de nombreuses classifications et notamment dans celle de Virginia Henderson. Parmi les 14 besoins fondamentaux que cite l’enseignante, la chercheuse et l’infirmière américaine se trouve le besoin de communiquer avec ses semblables. Plus précisément, elle désigne la capacité à être compris et à comprendre grâce à l’attitude, la parole, ou à un code, mais également à s’insérer dans un groupe social. On comprend donc que ce besoin est vital pour l’ensemble des individus et ici l’ostracisme signifierait une mort sociale.
Le processus de socialisation dépend donc d’autres besoins, dont, entre autres, celui de communication et de considération. Le premier permet de créer un espace de discussion, de réflexion, mais aussi d’échange d’expériences et de points de vue, indispensable en cas de blessures émotionnelles par exemple. Le second permet quant à lui de développer l’estime de soi, de reconnaître sa valeur dans et pour la société. Bref, la socialisation est un enjeu pour tous, et ce, à chaque étape du développement de l’être humain.
La difficulté de socialisation chez les profils complexes
Puisque les relations sociales nécessitent de savoir communiquer selon des codes préétablis, il paraît évident que certains profils HPI éprouvent des difficultés à s’intégrer socialement. Toutefois, il est important d’apporter une nuance à ce sujet. Tous les HPI n’expérimentent pas, en effet, cette difficulté, ce qui s’expliquerait certainement par la distinction entre les profils laminaires et les profils complexes.
S’il n’est pas question de mettre les individus dans une case, cette distinction a le mérite de proposer une lecture intéressante sur la douance. Pour rappel, voici les principales caractéristiques de ces deux profils :
- Le profil laminaire est travailleur et exigeant, reconnu comme étant bon élève et peut d’ailleurs aussi s’ennuyer à l’école, possède un QI homogène (la plupart du temps) et un raisonnement pointu, rapide et analytique.
- Le profil complexe est, quant à lui, créatif, sensible, à la recherche de reconnaissance et possède un QI généralement hétérogène, un raisonnement intuitif, un besoin de sécurité affective et de stimulation intellectuelle.
Selon cette distinction, les profils laminaires ont plus de facilité à s’intégrer socialement, bien qu’il est reconnu qu’une difficulté subsiste à cause de la présence de centres d’intérêts divergents. La complexité de socialisation est donc ici particulièrement sous-entendue chez les profils complexes. Le sentiment de décalage serait, en effet, plus présent au sein de ce groupe.
Les besoins propres aux HPI
Les HPI possèdent les mêmes besoins fondamentaux que ceux cités précédemment. La principale différence apparaitrait dans les conséquences entraînées par l’inassouvissement de ces besoins. Une réelle souffrance peut, en effet, être observée dans certains cas et leur besoin de communication freiné par de nombreux facteurs. Parmi eux, on retrouve la présence de :
- Centres d’intérêt singuliers,
- Attentes rigides sur un échange ou une relation,
- Fulgurances intellectuelles,
- Ou encore une incapacité à avoir des échanges superficiels, appelés également « small talks ».
Une frustration peut clairement être visible et engendrer le sentiment d’être incompris ou celui de ne pas être à sa place. Si tous ces facteurs peuvent entraîner un état de solitude et de souffrance, de nombreux zèbres choisissent délibérément cet état d’exil social.
La solitude choisie du zèbre
Le besoin d’isolement lorsqu’il est choisi est positif et apparaît même comme un signe de maturité émotionnelle. On peut voir deux raisons principales à ce besoin de solitude : le repos et la créativité.
Le repos pour les HPI et/ou les hypersensibles est souvent primordial. Le cerveau qui fonctionne 24h/24, le nombre de stimulus en constante augmentation, les émotions décuplées, bref, digérer toutes ces informations est vital. Ces temps de repos ainsi que leur fréquence varient d’une personne à une autre, mais sont sans aucun doute indispensables au bien-être du cerveau atypique.
La solitude est également le moment où la créativité du HPI explose. Le retrait permet non seulement de recharger ses batteries, mais également de déployer tout le potentiel du cerveau HPI, soit les pensées en arborescence, l’imagination, etc.
Ce qu’il faut retenir sur la douance et la socialisation
Douance et sociabilité sont souvent traitées avec une connotation négative. Le zèbre est souvent célèbre pour sa difficulté à avoir des relations sociales. Ces constats sont certainement justes et légitimes et font partie de nombreuses études, cependant, ne devrions-nous pas parler de développement social et non de socialisation pour les zèbres ?
En effet, là où la socialisation nécessite de s’adapter aux besoins d’un groupe, le développement social souligne d’avoir à la fois une image positive de soi et une préoccupation pour le bien-être des autres. Se focaliser sur ce processus ne permettrait-il pas aux zèbres de s’intégrer avec plus de facilité ? De plus, ne s’agit-il pas là du processus idéal pour devenir un être social sain et compatissant ?
Sources :
https://elodiecrepel.com/le-profil-laminaire-et-le-complexe/
Faure, N. (2009). Les besoins de l’enfant : un concept mesurable ? Analyse du questionnaire des besoins psychosociaux. Mémoire de Master de psychologie du développement. Université de Genève.
Maslow, A. (1943). A theory of human motivation, Psychological Review, 50, 370-96.d
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