
Des relations complexes chez la femme THPI et TSA
Dans le monde des neuroatypies, les femmes restent encore largement sous-représentées dans les diagnostics, les études… et les discours. Lorsqu’une femme présente un profil THPI (Très Haut Potentiel Intellectuel) et/ou un TSA (Trouble du Spectre de l’Autisme), son vécu relationnel est profondément impacté. Mal comprises, mal identifiées, elles naviguent souvent dans des environnements où elles doivent s’adapter en permanence. Cet article propose d’explorer la complexité des relations de ces profils, et d’éclairer les enjeux spécifiques liés à leur rapport aux autres.
Sommaire :
- Comprendre les profils : THPI & TSA au féminin
- Les défis relationnels spécifiques chez la femme THPI et TSA
Comprendre les profils : THPI & TSA au féminin
Avant de pouvoir parler de relations, il est essentiel de mieux comprendre les spécificités des femmes présentant un profil THPI (Très Haut Potentiel Intellectuel) et/ou TSA (Trouble du Spectre de l’Autisme), car ces caractéristiques influencent profondément leur manière d’être au monde — et donc aux autres.
Faire la démarche de se comprendre soi-même est primordial pour la femme THPI et TSA, ainsi, elle sera en capacité d’expliquer son fonctionnement à son entourage.
Le THPI, souvent défini comme un QI supérieur à 145, va bien au-delà d’une simple mesure d’intelligence. Il s’agit d’un mode de fonctionnement global : pensée en arborescence, grande rapidité de traitement, capacité de raisonnement complexe, mais aussi forte intensité émotionnelle et souvent hypersensibilité sensorielle. Chez les femmes, ce haut potentiel est encore aujourd’hui largement sous-diagnostiqué, car il se manifeste souvent de manière moins visible : perfectionnisme, camouflage, adaptabilité extrême, ou surinvestissement relationnel pour « coller à la norme ».
Peu de détection chez la femme THPI et TSA
Le TSA chez les femmes est lui aussi souvent difficile à repérer. Les critères diagnostiques, historiquement basés sur l’observation de garçons, passent souvent à côté des manifestations plus subtiles chez les femmes. Elles développent très tôt des stratégies de camouflage social pour s’adapter aux attentes et éviter les jugements. Cette capacité à « imiter » les comportements attendus les rend moins visibles, mais génère souvent une immense fatigue mentale, un profond sentiment de décalage, voire une grande détresse intérieure.
Lorsqu’une femme est à la fois THPI et TSA, cette double neuroatypie complexifie encore la situation. Le haut potentiel peut masquer l’autisme, et inversement. L’intelligence élevée peut donner l’impression qu’elle « fonctionne bien », qu’elle réussit à s’intégrer — mais cela cache souvent un coût énorme. La tension entre un besoin de logique et de vérité (caractéristique du THPI) et des codes sociaux implicites peu accessibles (caractéristique des défis TSA) crée un véritable tiraillement intérieur. Il n’est pas rare que ces femmes se sentent inadaptées partout, malgré une apparence de réussite, et qu’elles vivent un fort isolement affectif et identitaire.
Comprendre cette double singularité est donc fondamental pour aborder ensuite la question des relations — car ces femmes n’interagissent pas “comme les autres”, ni même “comme les autres femmes neuroatypiques”. Elles nécessitent une lecture fine de leurs besoins cognitifs, émotionnels et sociaux, et surtout une reconnaissance de leur fonctionnement unique, souvent invisible aux yeux des autres… mais aussi à leurs propres yeux tant que le diagnostic n’a pas été posé.
Les défis relationnels spécifiques pour la femme THPI et TSA
Les femmes THPI et/ou TSA rencontrent des obstacles relationnels bien particuliers, souvent invisibles depuis l’extérieur. Leur manière d’entrer en lien avec les autres ne suit pas les mêmes règles implicites que celles du monde dit « neurotypique ». Pour beaucoup, les relations sociales sont un terrain miné de malentendus, d’incompréhensions et d’efforts constants pour s’adapter.
Décoder les implicites – que tout le monde à l’air de piger !
L’un des premiers défis réside dans la lecture sociale. Les interactions humaines sont pleines de codes implicites, de non-dits, de subtilités émotionnelles. Pour une femme autiste ou THPI, ces signaux peuvent être flous, contradictoires ou tout simplement imperceptibles. Cela peut générer un sentiment de rejet, sans qu’on sache vraiment pourquoi, ou une impression constante de « jouer faux » dans une pièce dont on ne connaît pas le script.
Beaucoup de femmes dans cette double neuroatypie développent très tôt des stratégies de camouflage. Elles apprennent à imiter les comportements attendus, à copier les expressions, à rire au bon moment, à lisser leurs réactions. Mais ce “masking” a un coût : une fatigue mentale intense, une perte progressive de leur identité profonde, et parfois un effondrement brutal lorsque cette sur-adaptation devient insoutenable.
La sensibilité émotionnelle et sensorielle est un autre facteur qui complexifie les relations. Une remarque dite sur un ton un peu sec peut être vécue comme une blessure profonde. Une réunion de groupe dans un environnement bruyant peut devenir un enfer intérieur. Ces femmes perçoivent plus fort, plus vite, plus intensément — ce qui rend chaque interaction plus exigeante, voire douloureuse.
Help : besoin de vrai et de profondeur dans les relations
Par ailleurs, leur mode de pensée très structuré ou très conceptuel peut être en décalage avec la manière dont les autres communiquent. Les discussions de surface « smalltalks » ou les petites conventions sociales leur paraissent souvent creuses, tandis qu’elles aspirent à des échanges profonds, sincères, intellectuellement stimulants. Cette exigence relationnelle, parfois mal comprise, les isole encore davantage.
Enfin, il y a la double invisibilité. Ni les traits autistiques, ni le haut potentiel ne sont toujours visibles de l’extérieur. Ce sont des femmes qui, souvent, « ont l’air d’aller bien », qui sourient, réussissent, s’adaptent. Et pourtant, à l’intérieur, le sentiment d’être en décalage, seule ou illégitime est omniprésent. Ne pas se sentir reconnue dans sa différence crée une douleur silencieuse, difficile à verbaliser.
Conclusion
Le décalage ressenti dans les interactions n’est pas le fruit d’un défaut relationnel, mais bien l’expression d’un fonctionnement cognitif et émotionnel singulier. Les femmes ne manquent pas de capacités relationnelles — elles ont simplement besoin de repères différents. Dans le prochain article, nous verrons quelles stratégies concrètes peuvent être mises en place pour créer des liens plus justes, plus sereins, plus authentiques.
Références
🔗 Le podcast POTENTIEL de Elodie CREPEL – La double exceptionnalité 🔗
Avec la Dre Marianne Bélanger, psychologue spécialisée en neurodiversité, elle y décrit avec précision ce que vivent les personnes HPI avec des troubles associés (TSA, TDAH, dys…). Intéressant pour introduire la notion de double neuroatypie.
🔗 La BD « la différence invisible » de Julie DACHEZ et de Mademoiselle Caroline 🔗
L’histoire de Marguerite, une femme de 27 ans, qui découvre son TSA étant adulte et comprend à quel point elle s’est énormément adapté aux autres. Et qu’elle n’est pas folle !
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